Nouveau mémorial aux Lilas
Pendant la Seconde Guerre mondiale, jusqu’à 7 000 femmes ont été emprisonnées dans le fort de Romainville. Les lieux vont connaître une profonde transformation.
Que reste-t-il du passage de centaines de femmes résistantes emprisonnées dans l’enceinte du fort de Romainville aux Lilas, pendant la Seconde Guerre mondiale ? Seulement quelques graffitis - des visages, une leçon d’allemand - sur le mur de la casemate 17.
Pendant la guerre, jusqu’à 7 000 personnes ont pourtant vécu en ces lieux, bâtis au milieu du XIXe siècle. C’était le principal camp d’internement des femmes avant leur déportation vers les camps de la mort.Aujourd’hui, cet immense site de plus de 3 ha est propriété du ministère de la Défense. Mais les militaires l’ont quitté il y a bien longtemps. Sur les remparts, la végétation a repris ses droits. À l’intérieur du bâtiment principal - la caserne - les murs s’effritent.
La concertation débute
Les casemates en enfilade ont été fermées par des portes blindées. Tout semble figé, exception faite des émouvantes gerbes de fleurs déposées lors d’une dernière cérémonie d’hommage.
Mais ces lieux inhabités vont bientôt s’emplir de vie. Dans le cadre du concours Inventons la métropole, le promoteur Cibex a été retenu, à l’automne 2017, pour transformer en profondeur le fort de Romainville. La concertation autour de ce projet débute, deux visites sur site ayant été programmées pour ce samedi (complet) et le 8 juin. Des logements, un gymnase, une résidence étudiante… vont pousser là, à l’horizon 2024.
Aucun lieu dédié au sort des femmes pendant la guerre en France
Et les femmes résistantes dans tout ça, s’émeuvent depuis des dizaines d’années les associations de mémoire, au point d’avoir constitué, à l’été 2017, un Comité de sauvegarde du fort de Romainville - fort de 49 membres - pour peser sur le devenir du site. Rappelons qu’aucun lieu en France n’est dédié au sort des femmes pendant la Seconde Guerre mondiale.
« Les questions mémorielles sont extrêmement sensibles, estime l’adjoint au maire (PS) en charge de l’éducation et des démarches participatives, Lionel Benharous. Nous voulons que la mémoire de toutes les femmes, qu’elles soient résistantes, communistes, juives… soit représentée. Il ne me semble pas qu’il y ait eu de femme emprisonnée ici parce que tzigane, mais nous voulons aussi faire entendre cette parole mémorielle. »
Concrètement, le projet de Cibex prévoit de conserver intacte la casemate 17 qui abrite les graffitis et d’en consacrer environ six autres - sur les 23 existantes - à un mémorial.
Pour définir ce que l’on trouvera à l’intérieur, un comité de pilotage se réunira à partir de la rentrée. Lionel Benharous espère en faire un lieu à vocation pédagogique que « s’approprieront les établissements scolaires des environs ».
Si le projet avance, ça n’empêche pas les associations de « rester vigilantes ». « On a un problème de vocabulaire : on nous parle de mémorial mais nous voulons un musée, pas un simple monument », commente Françoise Bulfay, des Amis de la fondation pour la mémoire de la déportation. Elle insiste sur « le respect » de l’histoire des lieux : « C’est bien d’ouvrir le fort sur le monde, mais sans oublier sa mémoire. »
Samedi 8 juin, visite de 9 heures à 12 heures. Inscription obligatoire : 01.55.82.18.46 ou visitedufort@leslilas.fr
Livraison espérée en 2024
Parmi les bâtiments existants, la caserne sera transformée en hôtel-restaurant, tandis que les casemates - exceptées celles dédiées au lieu de mémoire - devraient abriter des ateliers d’artistes et des associations. Le site accueillera aussi un gymnase et une résidence étudiante.
Les architectes veulent également préserver la végétation qui a repris ses droits en certains endroits du fort et accorder une place à des projets d’agriculture urbaine. Les toitures seront végétalisées.
Tout cela, c’est sur le papier. La phase de concertation qui débute s’achèvera début 2020, espère Lionel Benharous. Restera ensuite à se mettre d’accord sur un prix de vente avec le ministère des Armées, avant les dépôts de permis de construire et les travaux. Objectif de livraison, horizon 2024.